dimanche 6 janvier 2013


SUR LA RÉCENTE DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
BILLET 1

Le samedi 29 décembre 2012, le Conseil Constitutionnel (CC) a rendu sa décision sur la loi de finances pour 2013, et annulé la prorogation des arrêtés Miot. Comme je l’ai entendu ici ou là, je ne crois pas à une quelconque opération de malveillance lors d’un weekend précédant les fêtes de fin d’année.

Le texte a été déposé devant l’Assemblée nationale  le 28 septembre 2012 ; il a été adopté le 20 décembre dernier. En statuant avant le 1er janvier 2013, le CC a permis que les dispositions adoptées, dans leurs parties conformes à la Constitution, puissent entrer en vigueur au 1er janvier 2013.   

Puis j’ai écouté bon nombre de parlementaires et d’élus faire part de leur profond étonnement car le CC aurait statué sur des dispositions de la loi de finances qui ne faisaient pas partie des motifs de la saisine.

Je me suis donc « étonné » à mon tour, car lorsque le CC est saisi d’une loi, il est saisi de du contrôle de l’intégralité du texte. Cette compétence est d’ailleurs redoutée de bon nombre de parlementaires ainsi que le faisait remarquer en 2006 Guy CARCASSONNE (professeur des universités, spécialiste du droit constitutionnel) : «  … le risque de l’imprévisibilité, du dommage collatéral, incite plutôt à la prudence en matière de saisine… ».

Je laisse le soin à chaque lecteur de conclure, soit sur l’ignorance de la procédure soit sur un pieux mensonge.

Mais pour rétablir la vérité peine et entière il faut remarquer que le CC a censuré non pas une (les arrêtés Miot), mais deux dispositions s’appliquant à notre île.

La seconde annulation qui est passée inaperçue concerne une disposition visant à achever les transferts de compétences de l’État vers la CTC, initiés par la loi du 22 janvier 2002, en matière forestière.
 
Cette disposition a été considérée comme un « cavalier budgétaire » par le CC : le cavalier budgétaire répond à l’intérêt des gouvernements successifs et de leurs majorités parlementaires qui veulent aller vite en introduisant dans les lois de finances des dispositions qui n’ont pas à y figurer.

Le CC note que ce transfert ne concerne « ni les ressources, ni les charges, ni la trésorerie, ni les emprunts, ni la dette de l’État ; ni les impositions pour des personnes morales (collectivités ou établissements publics) autres que l’État ; ni la répartition des dotations aux  collectivités territoriales et qu’il est donc étranger au domaine des lois de finances ».  

Voici pour l’annulation qui n’a pas suscité de commentaires. Passons donc à celle qui nous préoccupe : la non-prorogation des arrêtés Miot.

Lorsque le CC contrôle la loi il vérifie :
1 - si la loi énonce les objectifs auquel son dispositif est censé répondre ;
2 - si le contenu du dispositif est conforme au principe de l’égalité des citoyens devant les charges publiques.
Le CC acte que la loi de finances 2013 met en œuvre trois orientations politiques :
→ elle accroît significativement les prélèvements obligatoires, 30 milliards d’€ environ ;
→ elle modifie la fiscalité des revenus du capital qui sont imposés de manière plus importante que les revenus d'activité ;
→ elle rehausse le taux de l'impôt sur la fortune, rapprochant ce dernier de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en vigueur jusqu'en 2011

Le CC n’a jugé aucune de ces trois orientations contraire à la Constitution.

Le CC est ensuite passé à la 2ème phase de son contrôle : examiner si chacune des dispositions du texte respectait le principe d’égalité devant les charges publiques.

Il a constaté que le régime fiscal dérogatoire pour les immeubles situés en Corse, dispensait leur transmission de paiements des droits de mutation.   

Dans le contexte de maîtrise du déficit budgétaire (dépenses supérieures aux recettes sur une année) et de la dette publique (somme des déficits annuels) conduisant aux trois orientations du gouvernement et du parlement, il a jugé que les dispositions constituaient une rupture de l’égalité des citoyens devant les charges publiques.

On peut envisager que des finances publiques saines assorties d’une baisse des prélèvements obligatoires auraient pu conduire à une décision contraire.

Mais en fait cette décision d’abrogation était déjà en marche depuis 2002.

Ce sera l’objet d’un prochain billet.  

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