mardi 29 octobre 2013

AU DELÀ DE SARTENE
LE VOLET DÉVELOPPEMENT DURABLE DU PADDUC

(Sartè è u Valincu - cliquer pour agrandir) 

La conférence régionale de coordination  du développement économique et social qui a eu lieu le mardi 22 octobre 2013 était consacrée à l’examen du volet  développement durable (DD) du PADDUC.

J’y ai assisté en qualité de président de la chambre de commerce et d’industrie régionale de la Corse. Voici mon intervention. Elle a pour but de vous présenter l’apport des acteurs économiques à l’élaboration du PADDUC. On entend ici ou là que les élus ne font rien. Moi je vous dis en toute modestie que je prends ma part d’effort dans ce processus, comme je le fais avec constance à Sartène.

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Dans sa partie III intitulée « grandes orientations économiques» le PADDUC retient 27 mesures regroupées en trois types d’actions :

-tout d’abord l’adaptation vers l’économie durable,
-ensuite la création d’emploi et le partage de richesses produites
-et enfin les équipements en infrastructures et transports.

Mon propos porte sur les mesures relatives à l’adaptation vers l’économie durable.
L’objectif qui est de diminuer les facteurs de dépendance, a conduit à 5 grandes mesures :

Mesure 1 Identification des espaces à risques (naturel ou industriel) pour protéger  les biens et les personnes.
Mesure 2 Application du principe de précaution aux modes d’urbanisation des futurs espaces à construire et du principe de gestion économe des terres agricoles.
Mesure 3 Valorisation de l’espace pour transformer la filière touristique en filière de l’économie durable (transition touristique).
Mesure 4 Développement  prioritaire des activités économiques basées sur les ressources propres de l'île, (notamment agriculture et forêt) pour limiter sa dépendance.
Mesure 5 Identification des actions à mener pour diminuer la dépendance énergétique.

Je vais donc apporter des commentaires sur les mesures 3, 4 et 5 qui entrent dans le champ d’action de la CCIR.  


I – SUR LES MESURES 3 ET 5

La CCI est en train d’élaborer son Schéma Sectoriel de Développement Durable (SSDD) sur lequel je reviendrai plus tard.

L’objectif est d’utiliser l’effort à mener sur le DD en potentiel de développement et comme vecteur de qualité pour la filière touristique. De manière pratique il s’agit :
-de solaire dans les établissements hôteliers,
-de circuit des déchets,
-d’effort en blanchisserie,
-d’aménagement et entretien des sites,
-et de rapprochement avec la faculté de Corte pour valider économiquement les solutions existantes ou pour soutenir des actions porteuses de développement.

Reste à évaluer les besoins financiers pour mettre en œuvre ces objectifs, ce qui conduit aux interrogations suivantes.

Questionnement 1 : Il porte sur la forme d’une action publique de levier.

Sera-t-il plus propice d’avoir des aides ciblées (existantes ou à mettre en place) par le biais du PO FEDER (ADEC ou OEC)  ou des incitations fiscales indirectes ?

Je penche pour des incitations fiscales indirectes, à l’image de la zone franche qui a été la plus grande réussite de l’action publique (exonération d’IS si transfert de la masse correspondante en fonds propres, exonération de TP assortie d’une limitation, etc.)

Bien sur il y a eu des moutons noirs, mais cette mesure a eu le mérite de la simplicité en étant ouverte à toutes les entreprises qui entraient dans son champ d’action. Elle a été fort opportunément complétée par les plans COCHEF (pour commission des chefs de services financiers) chargé de renégocier les dettes fiscales et sociales en cas de difficultés. Le tout a conduit à un partenariat gagnant-gagnant entre entreprises et puissance publique.

Je puis cependant vous dire que la majorité des entreprises qui jouent honnêtement le jeu dans ce type de partenariat, sont favorables à des contrôles a postériori renforcés avec des mesures appropriées en cas de manquements. 

Questionnement 2 : Il porte sur le prix d’entrée.

Une entreprise qui entre dans un partenariat avec la puissance publique doit faire preuve de sa volonté en engageant ses fonds propres. Mais il est évident que suivant la taille, le type d’entreprise et le projet, l’apport en fonds propres ne peut être identique.

Aussi je propose de moduler la participation en fonction de critères à définir en fonction du secteur pour entrer dans une démarche soutenue par l’action publique.  

Questionnement 3 : Il porte sur les modalités d’intervention.

Je crois qu’il faut que le monde de l’entreprise se rapproche plus encore de l’ADEC et de l’OEC, pour évaluer les actions menées et le degré de satisfaction des entreprises qui ont bénéficié des divers concours qui leur sont destinés.

Les retours dont je dispose montrent que bon nombre d’entreprises qui souhaitent bénéficier d’un concours financier public sont découragées  par le circuit administratif qu’elles qualifient de « lourd », tout en reconnaissant qu’il s’agit de ne pas dilapider l’argent public.

Un allègement de la procédure d’accès aux divers concours est souhaité. Il permettra aux entreprises de concentrer la totalité de leur énergie et de leur temps sur la réalisation effective du projet. En contrepartie sont souhaités des contrôles à posteriori approfondis. 

Questionnement 4 : Il porte sur l’appropriation du DD par les entreprises.

Il conviendrait que le savoir faire et les efforts des entreprises entant dans une démarche DD soit reconnus par un label.

Je souhaite que l’on réfléchisse à un label et à une campagne de promotion pour transmettre l’idée d’entreprises responsables.


II – SUR LA MESURE 4


Questionnement 5 : Sur le constat

Le bon sens impose d’abord d’identifier et de quantifier les entreprises qui travaillent dans le secteur agricole et forestier, leur capacité de production, leur état financier et leurs perspectives de développement.

C’est ce que fait l’exhaustif  rapport de 162 pages qui nous a été remis mercredi dernier.

Sur ce point je ne peux que regretter le court délai qui nous a été accordé pour l’examiner (5 jours) alors qu’il était rédigé depuis le 20 septembre.

Compte tenu de son contenu je demande à pouvoir faire part des observations de la CCIR sur ledit rapport dans un délai d’une dizaine de jours.

Questionnement 5 : Sur le mode d’action en fonction des produits

Un travail en commun doit s’engager avec les chambres régionales d’agriculture pour promouvoir les circuits de distribution courts, les produits labellisés qui sont vendus et mis en valeur par les entreprises de service.

Questionnement 6 : Sur la biomasse

L’expérience de Corte (centrale bois énergie) et la filière bois ont fait l’objet d’un rapport du Président de l’Exécutif les 14 et 15 mars dernier. On y envisage même la cogénération (production de chaleur et d’électricité).

La centrale de Corte produit les palets nécessaires à l’alimentation des chaufferies insulaires (OPH 2B-cité Aurore, Collèges de Montesoro, Biguglia, Baléone, Bonifacio, lycée Jules Antonini, Fiumorbu et réseau de chaleur de Corte) et exploite le réseau de chaleur de Corte.   

Le passage de la sphère publique à la sphère privée est en train de prendre corps avec 600 installations individuelles en 2011. Mais pour en avoir une juste appréciation il faudrait connaître le nombre d’installations individuelles réalisés annuellement, données manquante au rapport. Mais le frémissement est là.

Se posent donc toutes les questions précédentes pour encourager le développement de cette filière.

Je propose qu’une mission commune CTC-communes et intercommunalités-entreprises de la filière bois et CCI travaille sur ce cas pratique.

Son but serait de déterminer au plus tôt ce dont la profession a besoin afin que la CTC l’intègre dans son Plan Climat Energie Corse (PCEC), l’objectif final demeurant la diminution de la vulnérabilité énergétique de l’île.  

Questionnement 7 : Sur l’apport d’information

Le rapport de la mission d’information de l’assemblée nationale sur la biomasse au service du développement durable en date du 19 juin 2013 devrait être présenté aux divers participants à cette consultation.

Parmi les mesures proposées deux méritent notre attention :

La 1ère vise à lutter contre les effets d’aubaine pour éviter un emballement semblable au secteur photovoltaïque sur la base d’une adaptation des tarifs d’achats aux  avancées technologiques abaissant les seuils de rentabilité.

La 2ème vise à soutenir les opérateurs sur l’ensemble de la chaîne. Performante au regard des autres énergies renouvelables, la biomasse n’est pas encore une énergie rentable.  Les  opérateurs doivent être soutenus pour faire avec les meilleures technologies et les matériaux les moins polluants, les infrastructures les plus sûres. Mais l’action publique est préconisée dès la production de bois ou de déchets, et non comme aujourd’hui à compter de l’édification de l’infrastructure de production d’énergie.


III – SUR L’ENSEMBLE DES MESURES FAVORABLES AU DD

Je souhaite apporter une vision entrepreneuriale à notre travail. Il est désormais communément reconnu et admis que la création d’emplois relève de la création d’entreprises.

Certes des routes, des zones d’activités, des offices et agences qui apportent leur aide c’est très bien. Mais il faut aussi faciliter la création d’entreprises productrices (pas la multiplication des salons de thé ou des bars) et leur expansion.

Je suggère de réfléchir aux moyens suivants pour aider les entreprises de l’île, compte tenu de leur spécificité (majorité de TPE : très petites entreprises) :

→défiscalisation d’une partie de l’investissement productif,
→aide à la création d’entreprise par report d’une partie de la fiscalité indirecte (TVA et autres) pour les premiers exercices,
→diminution des taxes locales par les collectivités locales : TLE et CFE (son taux est du ressort des collectivités locales alors que celui de la CVAE est fixée au niveau national en fonction du CA),
→mesures générale et simple de type zone franche et plan COCHEF.

L’exercice est difficile car nous sommes dans un contexte de crise des finances publiques qui diminue les recettes des collectivités locales et de l’Etat. Mais si les entreprises meurent les recettes fiscales diminueront et la courbe du chômage aura du mal à s’inverser.

  
IV – SUR L’EXPÉRIENCE DE LA CCIR

Je vous en ai parlé au début de mon propos et j’y reviens de manière plus précise, car en la matière les obligations imposées par la réforme des CCI de 2010 se conjuguent avec les objectifs du PADDUC.

1 – La CCIR et le DD

Les CCI apportent leur contribution à la réussite des politiques publiques de DD à la suite de la réforme de 2010 qui nous demande de poursuivre la modernisation engagée par nos institutions.

Pour ce faire, la loi donne à la CCIR compétence pour établir un cadre d’action pour les chambres territoriales dans les quatre secteurs suivants :
→la gestion des équipements aéroportuaires et portuaires;
→la formation et l’enseignement;
→l’aide à la création, à la transmission et au développement d'entreprises;
→le développement durable.

Le but est d’améliorer et d’harmoniser les services rendus aux entreprises de la région.

Dans chacun de ces domaines, la CCIR doit définir ses ambitions, sa stratégie et ses choix au travers d’un document dénommé schéma sectoriel.

Les objectifs de la commission chargée de l’élaboration du schéma sectoriel de DD ont été les suivants :  
1er objectif : faire du DD un moyen d’apporter de la valeur ajoutée pour les produits et services proposés par les entreprises ;
2ème objectif : apporter la vision des entreprises aux élus de la CTC chargés d’élaborer le PADDUC.
3ème objectif : proposer des secteurs prioritaires et un plan d’action.

Mais les entreprises connaissent la dure loi de la réalité économique. Aussi les solutions proposées conjuguent pragmatisme et ambitions. En effet les investissements nécessaires pour intégrer le DD dans la pratique dépendront bien souvent de la viabilité de l’activité porteuse de cette pratique.

C’est la raison pour laquelle les actions à mener sont centrées sur trois secteurs prioritaires :
-le tourisme,
-l’agro-alimentaire
-et le BTP.

2 – Les objectifs

Ils sont regroupés en fonction de 2 principes qui ont guidé notre réflexion : 
1er principe : Montrer l’exemple.
2ème principe : Mettre les mains dans le cambouis.

Les objectifs sont les suivants :
→ Engager les CCI dans une démarche interne de DD.
→ Renforcer la contribution des ports aéroports au DD avec la notion de « portes d’entrées de l’île estampillées DD ».  
→ Initier une veille sur les pratiques DD des CCI. 
→ Evaluer et corriger ces actions.

3 – Les actions concrètes

Voici quelques actions concrètes  retenues :

A : Démarche RSE (responsabilité sociale des entreprises) dans chaque CCI : formation aux achats durables, dématérialisation des marchés, tri des déchets, suivi des consommations et actions correctives, optimisation des déplacements des élus et agents.

B : Extension de la démarche aux ports et aéroports : amélioration des pratiques d’entretien et d’exploitation des équipements, lutte contre la pollution de l’eau et des sols, labellisation « Port durable » ou équivalent sur les aéroports.

C : Création d’une délégation DD à la CCIR, chargée de suivre et de porter la démarche DD au sein des autres schémas sectoriels.

D : Méthodologie : elle concilie des actions communes et des actions spécifiques : chaque CCI expérimentera une action pour la valider et l’adapter avant qu’elle ne soit étendue à l’autre. 

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Vous voyez le monde ne s’arrête pas à Sartène. En vous présentant cette réflexion mon souci est que les Sartenaises et les Sartenais sachent ce qui se passe en Corse, afin de ne pas laisser passer le train du développement.